Poème: Matrocité des bourgeons fatigués
Le service
On les habitue tranquillement entre deux comptines
À abattre des numéros abrutissants.
Les yeux infestés de néons,
Le pupitre comme oreiller,
Ils grandissent la colonne brisée.
Leurs dents grincent
les migraines pointent leurs neurones du doigt.
Obligés de boire un café pour son effet,
Pour être alerte dans un travail
Dont ils sont dépossédés.
Les aiguilles ralentissent leur temps.
Dépression et sommeil
Agitation et insomnie.
La richesse
Le tas de bijoux qu'on ramassera au porte-poussière.
La citation qui dit que les humains verront que l'argent se mange pas
Au loin j'entends l'or en goutte fuyant par le drain.
La multiplication des famines
Les inondations qui copulent
Le désert qui remplace la vie.
Pourquoi peindre fuck les pinceaux j'ai peur je vais faire pousser des légumes tsé!
La volonté
Ce qui reste de science,
Avant de retourner vers la peur
On a fait taire la musique
Et brisé le dernier séquenceur
On a refusé le soleil
Pour respirer le fossile.
Les petits gestes raisonnables
L'organisation de l'harmonie
Submergés par les tempêtes
Enfouis dans la lie
La survie
Survivant dans les montagnes
Dans des abris de fortunes
Les hommes et leurs compagnes
Dans des immondes communes
De nouvelles lois dirigent leurs vies
Le meurtre est moins banal
Infections, bactéries
Retour aux peurs médiévales
Les anciens vestons-cravates
Se promèneront à demi-nus
Ils auront l'air de granols
Mais se nourriront de viande crue
La vengeance
Le monde s'écroule lentement
Ou sinon d'un coup sec
Il pousse comme un champignon
Ou rampe comme le cancer
Ses carcasses de béton
Fragiles comme la santé
N'ont ni bras ni chainsaw
Contre les racines obstinés
La mort
Le silence définitif de la grande nuit
Les cocons-barricades en lambeaux
Les ruines lestées de leurs fardeaux
La paix minérale la fin de la sauvagerie
Le souvenir
À travers tout ça je me suis demandé:
À quoi bon l'art dans le chaos de la survie?
À quoi serviront ces peintures en cas de sécheresse?
Vais-je en être réduit un jour à me chauffer avec ces toiles?
Peu importe, c'était le témoignage d'une journée désolante.
Un dialogue entre un pinceau et des bourgeons fatigués